2-Mayerling :Dans un pavillon de chasse, un prince dévoyé
décide du destin de
l'Europe.
La personnalité de ce prince est marquée par une éducation militaire
brutale en même temps qu'un programme intellectuel qui ne convenaient pas à son
tempérament. Très vite, son père se rendit compte que Rodolphe ne
correspondait pas à l'emploi et au rôle qu'il lui destinait à la tête de la
puissante maison des Habsbourg, à ce mauvais moment de l'histoire de cette
nation composite au temps de l'éveil des nationalités en Europe.
Il s'en suivait de nombreuses disputes entre le père et le fils.
Rodolphe est tenu à l'écart des affaires politiques sérieuses car son père se méfie de
ses penchants pour le libéralisme, la démocratie, le fédéralisme. Ces mots
et les idées qui vont avec font scandale dans l'entourage de l'empereur.
Rodolphe écrit anonymement dans des journaux d'opposition où il exprime ses
idées chimériques d'une évolution de l'Autriche-Hongrie, alors qu'il est
épié nuit et jour par la police impériale.
Il ne partage pas les idées de son père favorable à l'alliance avec
l'Allemagne (le pangermanisme). Il penche lui, pour un rapprochement avec la
République française. Il est anticlérical, ennemi des privilèges qui
constituent l'assise de l'état impérial ; il soutient la cause des
nationalistes hongrois.
Mal dans sa peau, mal vu à la cour, Rodolphe se lance dans une vie dissolue.
Délaissant sa femme considérée à la cour comme une paysanne mal dégrossie
qui ignore tous les artifices d'un protocole baroque et surchargé, Rodolphe
fréquente en compagnie de son beau-frère, les mauvais lieux et contracte en 1886 une maladie vénérienne
qu'il transmet à son épouse qui du coup, ne peut plus espérer la venue d'un
héritier. Il voudrait divorcer, mais cela lui est interdit par le Pape.
Prenant conscience de sa déconsidération et du peu de sérieux que lui
accordent même ses amis politiques, Rodolphe désabusé pense au suicide. Il
fait part de cette intention, cherchant une femme pour l'accompagner dans sa
folie romanesque. Sa courtisane favorite Mitzi Caspar refuse sa proposition
macabre et en informe la police.
Comme tout se passait en famille dans un climat incestueux et décadent,
Rodolphe finit par trouver une toute jeune fille de 17 ans que lui présente sa
cousine et ancienne maîtresse Marie von Wallersee, comtesse Larisch, nièce
de l'impératrice Elisabeth d'Autriche (la fameuse Sissi) à qui ce rôle valut
la disgrâce et une demi-misère à la chute de l'empire austro-hongrois en
1918. Cette enfant, c'est Maria Vetsera.
La mère de cette Maria, bonne amie de Rodolphe,
était connue à la cour, mais Rodolphe n'avait pas remarqué la fille, encore
gamine sans doute, qui cherchait pourtant beaucoup à se faire voir et qui
pour faire moderne et par tradition familiale avait anglicisé son prénom en
Mary. Les rondeurs de cette gamine immature amusaient son esprit de fantaisie.
Toujours est-il que le
le 30 janvier 1889,
au matin, la terrible nouvelle arrive à Vienne:
Dans le pavillon de chasse de Mayerling près de Vienne, on a retrouvé le
corps sans vie de l'archiduc Rodolple héritier du trône de l'empire
austro-hongrois. Auprès de lui, gisait le corps dénudé de la
baronne Mary Vetsera sa maîtresse.
La première explication officielle du drame à la suite des constatations bâclées, est
que l'archiduc a tué sa maîtresse, et s'est ensuite suicidé selon un
scénario convenu entre eux.. Mais alors Rodolphe a été l'assassin de Mary Vetsera
! Ce serait là le scandale.
Cette circonstance a causé un grand embarras à la cour de Vienne. Il ne
fallait pas donc qu'on révélât la présence de la pauvre baronne aux côtés de
Rodolphe. Son corps a été évacué et enterré clandestinement afin de
préserver la réputation de la famille impériale. Tout cela est fait
maladroitement, sous ordre, et avec la complicité de tous, dans un climat de
panique.
Il lui a fallu batailler beaucoup pour que François-Joseph finisse par
obtenir du Pape Léon XIII l'enterrement de son fils en terre chrétienne dans
la crypte impériale des Capucins. On ne pouvait sauver que les apparences !
Etant donné le personnage, les circonstances politiques, et la
polémique, ce drame a été diversement expliqué. C'est certainement un
suicide puisque des lettres d'adieu de Mary Vetsera auraient été trouvées, mais
il est tentant d'y voir un crime politique sous la main de Bismarck opposé à
un axe Vienne-Paris et aux idées libertaires de l'indigne héritier. La
passion ne s'est pas encore éteinte autour de ce drame qui a été déterminant
pour le sort de l'Europe.
La mort de Rodolphe a désigné l'archiduc François-Ferdinand comme héritier
de la couronne.
Le 28 juin 1914, ce nouvel héritier peu crédible, mal protégé, victime d'un
mauvais hasard dans le climat politique du moment, est assassiné à Sarajevo.
Cet assassinat par le jeu des alliances et des conflits d'intérêt, va
déclencher automatiquement la première guerre mondiale 1914-1918.
La mort de François-Joseph (1916) vieilli et désabusé et l'issue de la guerre en novembre 1918,
sonnent la fin de l'empire austro-hongrois.
Qu'en aurait-il été de l'Europe si Rodolphe avait eu un autre destin en
accédant au
trône ?
